Nous avons eu droit a la pire des nuits en Mongolie : les gens des yourtes a cote ont chante (passe encore) puis se sont battus ! Les chiens se sont egosilles jusqu'au petit matin et les chevres et vaches ont ensuite prit la releve, prenant la tente pour de l'herbe... Resultat, on a dormi environ 2-3 heures et en ouvrant la tente, il neige a gros flocons ! La steppe est recouverte d'un mateau blanc, c'est a peine croyable.
On reste un moment au chaud a somnoler, puis notre guide vient "frapper" a notre tente pour nous convier dans la ger afin de nous rechauffer. On comprend qu'on ne partira pas aujourd'hui... Compte-tenu des deboires de la veille, on n'est pas tres surs de ce qu'on va trouver dans la yourte. En entrant, nous avons le plaisir de constater que le calme est revenu : l'un des jeunes dort encore parterre tandis que les trois autres, dont Dawa, boivent un the fumant. Parmi tous ces hommes, nous retrouvons egalement Irina, une francaise avec qui nous avons fait connaissance la veille. Elle n'a evidemment pas beaucoup dormi non plus puisqe son lit est dans cette ger... Elle nous raconte en detail les aleas de la soiree, plutot souriante ! Elle est de bonne composition :) On discute comme ca tous les trois sur l'un des lits pendant qu'en face de nous, les mongoles parlent... de nous. La curiosite marche a double-sens.
Vers 11h, le guide d'Irina, Ogi, demande un couteau ; on lui tend toutes les lames qu'on trouve autour de nous, mais ca ne lui convient pas. Il veut un couteau qui coupe bien et il nous mime qu'il va tuer une chevre ! Aurel lui passe son couteau suisse, Ogi verifie le tranchant de la lame puis releve la tete d'un air satisfait. Il sort en laissant la porte de la ger ouverte puis se repointe devant, tenant une chevre par les cornes !
AVANT
On hallucine totalement, nous trois etrangers ! Ogi prend un lourd piquet, maintient fermement la biquette par le cou entre ses cuisses et "BAM !" frappe un grand coup sur la tete entre les deux cornes. La bete s'effondre instantanement ! Moi j'ai deja les larmes qui montent ; je ne sais pas si c'est le trop plein d'emotions ou la rapidite de l'action... Ca me fait un drole d'effet de voir d'aussi pres comment en dix secondes on passe de la vie a la mort. La biquette ce matin etait encore entrain de paitre tranquillement et puis... c'est fini, point.
Ogi lui fait un trou dans la pense, entre le bras dans les entrailles et sectionne une artere. La poche d'intestins forme une boule a l'exterieur de l'animal, mais pas une goutte de sang. Me voyant traumatisee par l'evenement, Ogi met son del sur mes epaules. Ca contraste avec la brutalite de l'acte precedant ! Ensuite, il demande a Aurel de l'aider a rentrer la bete dans la ger. Il ouvre la peau du ventre avec une dexterite qui fait froid dans le dos et depesse petit-a-petit la chevre.
La encore, nous sommes eberlues : pas une trace de sang sur la peau ! Il retire les tripes de l'animal et les met dans une bassine ; il finit pas couper la chevre en morceaux dont certains sont accroches sur le treillage en bois de la yourte. Voila, on vient d'assister a l'abattage le plus authentique et traditionnel d'une chevre ! Et tout avec notre couteau suisse ! On en revient pas...
APRES
Quelques minutes plus tard, deux femmes entrent et s'asseyent autour de la bassine pour nettoyer les intestins. Eelles vident chaque boyau et y verse de l'eau chaude pour retirer les herbes digerees. Ogi, pendant ce temps, a recupere le sang dans un recipient, plonge la main dedans et malaxe les morceaux. Le sang est ensuite verse dans les boyaux qui seront mis a cuire sur le poele.
Pfiou... ben dis-donc, ca c'est de laventure ! J'espere que nous n'aurons pas "l'honneur' de gouter aux tripes parce que ca ne se fait pas de refuser...
vers 14h, on se retire poliment pour une petite sieste ; je pense que tous sont dans notre cas car certains sont deja en "position dodo". On recupere pendant deux heures ! Ca fait du bien. Une fois de plus, Dawa revient nous chercher. Il doit avoir du mal a croire qu'on puisse etre a l'abri dans une tente :) il faut dire que la neige continue de tomber et qu'elle ensevelit la toile progressivement. On ne nous voit pratiquement plus dans tout ce blanc environnant !
Nous retournons dans la ger avec tous les bonshommes et Irina qui est encore dans les bras de Morphee. On nous sert un the au lait bien chaud et puis notre guide et un autre jeune se mettent en cuisine ; trop cool ! Dawa prepare des nouilles avec de la farine, de l'eau et du sel. Il fait des grands ronds de pate tres fine qu'il fait juste dorer sur le poele ; ensuite, il les coupe en lamelles et les met a cuire a la vapeur. Il prend un morceau de la biquette pendu au mur et la decoupe en petits des (comme avec le mouton). La viande dore dans un recipient en alu et les nouilles cuisent par-dessus avec la vapeur de la viande. Il nous sert le tout dans un bol, a manger a l'aide des doigts ; c'est un regal ! La chevre, c'est tendre et pas fort de gout. On termine avec du yaourt au lait de chevre, un delice !
Nous sommes bons pour retourner au lit ! En priant pour que les debauches de la nuit passee ne reprennent pas ce soir. Visiblement, ils sont bien KO et pas de moto a l'horizon, donc pas de vodka ; pour le moment... En tout cas, Irina nous a confirme que Dawa, lui, ne s'etait pas battu la veille. On aime mieux ca.
